(…) dans un jardin, l’application d’un smartphone a nommé une fleur juste apparue sur l’écran. Entre la plante et la machine, aucune connivence mais un algorithme de reconnaissance d’images capable de traiter en un instant des milliers de portraits-robots issus chacun de milliers de photos. Plus besoin de manuels rébarbatifs ni de loupe, plus besoin de mémoire, ni de débattre entre humains, finis les risques, les chances de ne pas savoir où s’ancrent des questions nouvelles. Un nom, et l’affaire passe à l’oubli. Le même procédé s’applique aux insectes, aux champignons, aux chansons, aux gazelles, aux étoiles. Plus nécessaire d’intérioriser les signes du visible et de l’audible, les résonances de l’invisible et de l’inaudible. Plus d’espace infini entre le réel et son appréhension.
Pierre Lieutaghi, La surexplication du monde
© Photos by Esther Hege, gestalt thérapeute, psychothérapie
Comments